La 9ᵉ édition du Congrès France Bioproduction se tiendra les 19 et 20 mars à Tours. Coorganisé par Polepharma et Medicen, cet événement phare mettra en lumière les dernières avancées en bioproduction, avec un focus particulier sur l’usine Modulus de Sanofi, acteur majeur et partenaire premium du congrès.
« Dans un monde aussi incertain, l’agilité et la flexibilité sont essentielles ! » souligne Franck Leroux, responsable de la stratégie industrielle et de l’excellence opérationnelle chez Sanofi, qui partage sa vision du biomanufacturing de demain.
Un sujet qu’il abordera avec ses équipes lors d’un temps fort du Congrès France Bioproduction.
Pourriez-vous vous présenter rapidement ainsi que votre parcours dans l’industrie (bio)pharmaceutique ?
Ingénieur de formation, j’ai passé huit ans chez Renault dans le secteur automobile avant de rejoindre Sanofi en 2002, au sein des activités industrielles. Durant 22 ans, j’ai occupé divers postes dans les fonctions support – supply chain, finance et stratégie – ainsi que des fonctions opérationnelles en dirigeant plusieurs usines sur le continent américain. Depuis trois ans, je pilote la stratégie industrielle, la performance et la modernisation des sites de production du réseau industriel de Sanofi et, depuis peu, le lancement des nouveaux produits.
Que représente le Congrès France Bioproduction pour vous et votre entreprise Sanofi ?
Le secteur biopharmaceutique évolue à un rythme soutenu, porté par des innovations constantes venant de toutes parts. Il est essentiel de rester attentif, de suivre les nouvelles tendances et les ruptures potentielles pour s’en inspirer, tant chez Sanofi qu’au sein de la filière. Grâce à des référentiels internes, Sanofi se compare régulièrement à la concurrence, avec l’ambition de rester à la pointe de l’innovation et de la performance. Cet engagement explique notre intérêt pour le partage et l’échange de bonnes pratiques. C’est tout l’enjeu du Congrès France Bioproduction, un événement incontournable pour nous !
Quel est le sujet de votre intervention et pourquoi est-ce un enjeu dans ce secteur ?
Depuis trois ans, nous avons engagé un programme de modernisation sans précédent de notre réseau industriel, qui compte une quarantaine de sites stratégiques avec une augmentation des investissements sur trois axes.
Le premier vise la création de nouvelles unités de lancement de nouveaux produits, alors que nous avons une trentaine de mises sur le marché prévues d’ici 2030, principalement en immunologie.
Le second concerne la standardisation des unités industrielles et l’intégration de technologies numériques pour optimiser les processus grâce aux leviers de la digitalisation et de l’automatisation. Objectif : bénéficier d’unités à la pointe de la technologie dans le secteur biopharma !
Et, le troisième, vise à avoir une supply chain end-to-end connectée et fluide, des fournisseurs jusqu’à la distribution, pour accélérer la livraison de nos médicaments aux patients. Ces trois axes définissent la stratégie de modernisation de Sanofi.
Les avancées réalisées au cours des trois dernières années commencent à être reconnues dans la filière. Notre présentation, lors du Congrès France Bioproduction 2025, vise ainsi à rappeler les objectifs fixés il y a trois ans, faire le bilan des progrès accomplis, et partager les prochaines étapes, en mettant l’accent sur l’intégration croissante de l’intelligence artificielle dans nos processus. Nous avons dernièrement augmenté les ressources allouées à l’IA, avec des cas d’usage concrets incroyables et prometteurs à partager, comme l’automatisation de la documentation, réduisant la charge de travail de 50%. L’IA devient un axe prioritaire pour améliorer les processus transactionnels et renforcer la performance industrielle.
Avec Modulus de Sanofi, l’usine 4.0 devient réalité. Qu’est ce qui est révolutionnaire et préfigure l’usine biopharma de demain ?
L’usine Modulus de Sanofi reflète l’avenir de la production biopharmaceutique grâce à sa flexibilité, modularité et sa capacité à s’adapter aux produits de notre pipeline en fonction des résultats des essais cliniques. Elle peut produire à la fois des médicaments et des vaccins, en intégrant différentes technologies dans un modèle plug and play, à l’image d’un jeu de Lego où les briques sont assemblées selon les besoins. Cette flexibilité repose également sur l’utilisation d’équipements et accessoires single-use pour la production à petite échelle. À titre d’exemple, nous avons actuellement un nouveau vaccin contre le virus respiratoire syncytial (VRS) qui est une cause majeure d’infections respiratoires avec un fort potentiel en santé publique. Les résultats seront disponibles dans les deux prochaines années. Si les essais sont concluants, nous lancerons le vaccin avec Modulus, tout en envisageant simultanément un investissement dans une autre unité pour une production à plus grande échelle sur le long terme. A terme, les deux usines Modulus de Neuville-sur-Saône (France) et de Singapour seront capables de répondre aux besoins de production régionaux (pour l’Europe et l’Asie), notamment en cas de pandémie. Entièrement digitalisé, avec des technologies d’automatisation et de robotisation, chaque site vise à réduire son empreinte carbone et sa consommation d’eau, tout en optimisant les ressources. Bien que l’intelligence artificielle ne soit pas encore pleinement exploitée, elle sera intégrée dans les futurs cas d’usage pour améliorer encore la performance. Les sites Modulus seront opérationnels d’ici fin 2025.
Avec ces usines de pointe, quelle direction est donnée à la stratégie biomanufacturing globale ?
La stratégie repose sur quatre axes clés pour adapter le réseau tout en accélérant l’innovation et optimisation des ressources.
Le premier est l’expansion de nos capacités de production, avec une augmentation de 40 % des investissements ces dernières années sur plusieurs sites pour répondre à la hausse des lancements et de la demande.
Le second consiste à créer des sites référents au sein de notre réseau – appelés « lighthouses » en langage maison, qui servent de plateformes d’expérimentation à l’innovation et aux nouvelles technologies avant leur déploiement à l’échelle mondiale. Nous avons ainsi abandonné le concept « d’usine du futur » pour éviter un réseau à deux vitesses et privilégier la standardisation.
L’accent est également mis sur la standardisation de notre modèle organisationnel à l’échelle des sites, visant à harmoniser les structures, les processus industriels, ainsi qu’à uniformiser les rôles et les pratiques dans toutes nos usines.
Enfin, cette démarche s’inscrit dans le cadre de la diffusion de la culture « One Sanofi », afin que tout le monde parle le même langage et avance dans la même direction avec une vision partagée. Sanofi était jusqu’ici structuré en trois business units, chacune avec ses propres méthodes et fonctionnement : médecine de spécialité, vaccins et médecine générale. Nous avons « dé-siloté » ces unités en créant des groupes inter-sites pour partager les bonnes pratiques et favoriser le dual sourcing. Parallèlement, nous avons rééquilibré le pilotage de la performance en intégrant les axes sécurité, qualité, supply et compétitivité. L’ambition est d’avoir une organisation simplifiée, connectée et performante, ancrée dans une culture commune « One Sanofi ».
Quel sera, selon vous, le principal défi à relever par les entreprises de Polepharma et Medicen au cours des cinq prochaines années ?
Le premier challenge des prochaines années réside dans la gestion de l’incertitude sur plusieurs fronts. Cela inclut l’incertitude concernant le pipeline de médicaments, la réussite des études cliniques et les indications à succès, ainsi que l’impact des demandes spécifiques des pays et des contraintes géopolitiques (US, Chine, etc.). Les entreprises doivent disposer d’une plateforme industrielle flexible pour produire le bon produit, au bon moment, au bon patient, et répondre aux exigences des différents pays. Cette flexibilité requiert une agilité sans précédent des équipes. Par exemple, le succès du médicament Dupixent, avec ses six indications actuelles et d’autres à venir, illustre l’incertitude sur la demande future, qui varie d’un pays à l’autre. La fiabilité de la demande impacte directement la supply chain. Il est donc crucial d’avoir une supply chain intégrée, connectée, réactive et capable d’anticiper les besoins, en s’appuyant sur les bonnes données. Agilité, flexibilité et anticipation sont désormais les maîtres mots du secteur biopharma.
Quels seront les leviers de la réussite ?
Dans un contexte géopolitique incertain, plusieurs sujets clés émergent, tels que la résilience de la supply chain avec plus de dual sourcing, l’intelligence artificielle et l’expansion du single-use. La vitesse est désormais primordiale dans le développement des biotechs, car la science progresse rapidement, notamment avec l’utilisation de l’IA pour analyser les résultats cliniques. À l’image de l’industrie aéronautique ou automobile, où les tests sont désormais virtuels grâce aux jumeaux numériques et à la digitalisation, l’industrie biopharmaceutique doit intégrer ces technologies pour accélérer ses processus. L’objectif est que l’innovation soit mise rapidement à disposition des patients, tout en étant audacieux dans l’adoption de nouvelles technologies. Cependant, cette rapidité exige aussi une gestion rigoureuse des risques liés à la supply chain, qu’il s’agisse de défaillances de fournisseurs ou de risques naturels imprévus. La vigilance – aussi – est essentielle !
Comment Polepharma et Medicen peuvent-ils aider les entreprises à se réinventer et appréhender ces mutations industrielles ?
Chez Sanofi, nous avons une forte conviction dans l’avenir de la bioproduction en France. En tant que membres de Polepharma, Medicen, France BioLead et partenaires du Campus Biotech Digital, nous nous engageons activement à acquérir et développer des compétences pour soutenir la croissance du secteur. Sanofi est d’ailleurs le principal partenaire du Campus Biotech Digital, représentant 90% des engagements pris par cette entité. Avec une empreinte industrielle de 30% de notre réseau en France, il est crucial pour nous de bénéficier d’un écosystème dynamique et de partenaires compétents pour garantir le succès des lancements à venir pour les patients. C’est pourquoi nous nous sommes engagés cette année comme partenaire Premium du Congrès France Bioproduction. Avoir Polepharma et Medicen à nos côtés constitue un véritable atout, un partenariat gagnant-gagnant pour tous !
Propos recueillis par Marion Baschet Vernet